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Santé. Nécessité d’une filière industrielle

La crise liée au coronavirus a mis en évidence la faiblesse de notre appareil productif qui n’a pas été capable de fournir le matériel et les produits nécessaires pour pouvoir mettre en œuvre une stratégie adaptée et efficace, à la différence d’autres pays, notamment l’Allemagne ou le Japon.

Cette situation est la résultante de choix des grandes entreprises industrielles françaises privilégiant certaines activités et en délaissant d’autres au motif d’une meilleure rentabilité. C’est ainsi que Thomson-CSF, devenu depuis Thalès, a vendu au début des années 1980 à l’entreprise américaine General Electric sa filiale, la Compagnie générale de radiologie, qui était à l’époque leader en Europe sur le développement des premiers scanners. Bien entendu, cette entreprise s’est empressée de faire main basse sur les brevets et a fermé les usines en France pour développer la production aux États-Unis. Pendant ce temps, Thalès a concentré l’essentiel de ses moyens de recherche dans le secteur militaire !

L’évolution des techniques médicales nécessite aujourd’hui le développement d’appareils de diagnostic et de traitement de plus en plus complexes.

Développement des matériels

Cela implique une collaboration étroite entre les professionnels de santé et les acteurs industriels afin de développer et de produire en proximité les nouveaux outils utiles en partant des besoins. L’ensemble des acteurs de la filière des dispositifs médicaux fait, depuis des années, le constat que l’absence de structuration de cette filière industrielle en regard des politiques de santé exprimées par les institutions publiques aboutit, du fait de l’expression dérégulée des forces du marché, à une dépendance aux firmes étrangères pour la production de dispositifs essentiels pour assurer une prise en charge optimale des patients.

Inciter à la coopération

Différents rapports font le constat, juste et réel, que la France dispose d’une recherche performante, ainsi que de nombreuses PME, mais que la filière reste à l’état d’ébauche, avec des acteurs centrés sur leurs préoccupations, sans vecteurs d’incitation à la coopération. Cette réalité empêche les entreprises de se développer et freine la valorisation des innovations produites par les organismes de recherche. Lever ces obstacles récurrents passe par la création de lieux d’émulation fédérateurs, d’accélération et d’applications concrètes, mettant à la disposition de la filière les capacités d’industrialisation. Ceci permettrait de développer, de transformer les innovations technologiques en produits utiles et adaptés aux soignants. Pour créer les conditions optimales de succès, il revient naturellement au régulateur public, porteur de l’intérêt général, de définir le cadre coopératif en réglant, au préalable, les délicates questions de ressources mises en commun et de propriétés intellectuelles, ceci en concertation avec les différentes parties prenantes, y compris les organisations syndicales.

La Cgt porte des revendications permettant de contribuer à résoudre cette problématique et de qualifier concrètement le fondement industriel de la filière. Actuellement, ce projet est centré sur l’imagerie médicale, il doit être élargi à d’autre dispositifs médicaux et en premier lieu les respirateurs et à la relocalisation des productions en France des produits pharmaceutiques (médicaments, masques, solutions hydroalcooliques, gants, etc.). La crise sanitaire a révélé la pertinence de nos analyses et met au grand jour la dangerosité, pour la France, d’être dépendante d’États et de sociétés étrangères.

Répondre aux besoins

C’est pourquoi, il apparaît essentiel de soutenir des projets très concrets permettant à la fois de répondre aux besoins des soignants et du système de santé à court terme, mais aussi de structurer la filière pour aboutir à la création de centres de développement et d’industrialisation des dispositifs médicaux, assurant une fourniture rapide et de proximité aux structures de soins. Comme nous parlons de produits complexes, devant garantir la sécurité de données sensibles, la revendication de revoir l’intégralité de la sous-traitance liée à la production de ces appareils prend toute son importance. En effet, il serait illusoire de garantir la sécurité et l’indépendance de notre système de santé si nous ne réalisons que l’assemblage de ces appareils en France, avec des composants fabriqués dans des pays à bas coûts, dans d’autres régions géographiques du monde.

Concrètement, il est primordial que le pilotage par l’État au sein du Conseil national de l’industrie associe les organisations syndicales ainsi que des représentants de la société civile, les utilisateurs finaux (techniciens et soignants hospitaliers, prescripteurs de la demande, etc.) dans le processus de prise de décision. Il serait aussi possible de créer des centres de recherche technologiques dans chaque CHU disposant d’un budget propre, ce qui permettrait, notamment, d’orienter les commandes publiques vers du matériel fabriqué en France.

Dans l’immédiat

Au niveau des actions immédiates, deux projets peuvent être concrétisés rapidement. Il s’agit, d’une part, de la création d’un centre public de développement technologique et d’industrialisation des respirateurs, en se basant sur l’expérience du consortium industriel PSA/Schneider/Valeo/Air Liquide qui a été mobilisé lors du pic de la crise du coronavirus. Malheureusement, les 10 000 respirateurs produits sont des appareils de secours et nous avons besoin maintenant de produire des respirateurs de réanimation aux performances plus élevées. D’autre part, il est proposé de mettre en place un centre public de développement technologique et d’industrialisation de l’imagerie médicale à Moirans (Isère), sur le site historique de fabrication de détecteurs radiologiques, encore dans le giron de Thalès, dont la vente a été empêchée, il y a quelques années, grâce à la mobilisation des salariés. Il serait ainsi possible de développer et de pérenniser des savoir-faire reconnus, d’excellence mondiale, gages de réussite de la nécessaire transformation de la filière.

Ces quelques exemples montrent que le déclin industriel de la France n’est pas inéluctable et qu’il est possible de reconstruire une filière industrielle capable de répondre aux besoins dans le domaine de la santé, secteur de haute technologie du XXIe siècle.

Dr Christophe Prudhomme

Photo de Une : ©Ludovic Godard

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