Printemps 1963. Guy rentre aux PTT, d’abord auxiliaire, puis facteur, par concours. Robert, facteur-chef, ancien résistant, lui parle de la Cgt. « Il m’a remis ma première carte CGT, le 1er juin 1963. J’entends encore ses paroles : “Je suis heureux de voir arriver des jeunes dans le syndicat. Vous allez très vite avoir des responsabilités syndicales, alors soyez toujours irréprochables sur le plan professionnel... Enfin, soyez gourmands de lecture, nous en avons besoin pour comprendre et agir” ». C’est vrai, les responsabilités et la soif de lecture sont arrivées très vite. « Le syndicalisme, pour moi, c’est le refus de subir l’injustice, une lutte pour exiger le respect et la dignité.»

1968, piquets de grève, manifs tous les jours, sit-in avec les lycéens. Effervescence et démocratie. Au bout de trois semaines de grève, des conquêtes sociales importantes, salaires, primes, conditions de travail et des droits syndicaux qui ont permis d’aller à la rencontre des collègues, de les informer, de les former. Guy se souvient : « On a pu aussi partager nos droits avec l’interpro. 1968 nous a appris que la lutte ne s’arrête pas à la porte du bureau de poste. Des souvenirs inoubliables au plan social, bien sûr, mais aussi des moments de fraternité et de solidarité ».

Guy égrène les dates. 1974, les PTT sont bloqués pendant 35 jours en Haute-Marne contre la première tentative de privatisation. Et le service actif est gagné pour les postiers qui travaillaient de nuit (retraite à 55 ans). Concernant la privatisation, la lutte reprendra en 1987 contre le plan Longuet. « Il ne s’agit pas de dresser un tableau idyllique, c’était parfois dur de tenir pour certains collègues et il y avait du découragement, mais là encore, c’est la solidarité et la fraternité qui nous ont permis de tenir le coup... » 1995, Juppé a été obligé de retirer son plan de casse de la Sécu. 2 millions de manifestants dans les rues ; ça pétille de passion dans les yeux de Guy. Et toutes les actions menées au quotidien ou contre les coups portés à la retraite depuis Balladur jusqu’à Macron. Dans toutes ces luttes, c’est l’unité qui a été déterminante. L’unité syndicale, certes, mais aussi l’unité entre générations. Et il déclare : « Il y a un beau mot pour cela : la solidarité et c’est hors d’âge... »

La misère et la galère

La crise sanitaire et sociale liée à la pandémie a aggravé les conditions de vie de tout le monde, salariés, chômeurs (avec la réforme de l’assurance chômage), des retraités et des jeunes. Mais avec un taux de chômage qui dépasse les 30%, les jeunes subissent de plein fouet les effets de cette crise. On entend des infos effrayantes : un étudiant sur quatre ne mange pas à sa faim, 1 sur 3 présente des signes de détresse psychologique, 1 sur 2 souffre d’isolement.

Isolement, détresse psychologique, des mots pour les jeunes, mais aussi pour les personnes âgées. Selon les organisations caritatives, la faim gagne de nombreux retraités. Les femmes sont particulièrement concernées. Et n’oublions pas qu’au plus fort de la pandémie, nos gouvernants ont pris la décision de ne pas soigner correctement les plus âgés et de laisser la jeunesse dans une précarité extrême.

Alors que le Gouvernement et le patronat jouent la carte de la division, le syndicalisme doit aller à la rencontre de la jeunesse. Et le syndicalisme retraité en premier lieu. Unir dans l’action ceux qui ont eu vingt ans en 1968 et ceux qui les ont aujourd’hui est une urgence syndicale et sociale.