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Christian Rauth : « Les riches font la charité, pas la solidarité. »

Son rôle au côté de Roger Hanin dans la série télévisée Navarro l’a révélé au grand public. On sait moins qu’il est aussi scénariste, auteur de pièces de théâtre, romancier… et un citoyen inquiet, qui s’engage lucidement.

Vous êtes un peu touche-à-tout ?

C’est la comédie qui domine, mais c’est l’écriture qui prend le pas sur mes autres activités… Ça vient de loin : j’avais 15 ou 16 ans, ma grand-mère était concierge Boulevard Montparnasse à Paris. Elle faisait des ménages chez un écrivain. Je voulais être critique littéraire ! Elle lui a demandé de me rencontrer, il a accepté. Me montrant les murs de livres qui garnissaient son bureau, il m’a dit : « Tu veux être critique littéraire ? Commence par lire tout cela ! »

J’écris des romans policiers qui sont finalement plus « romans » que « policiers ». Je n’ai jamais fait le métier de comédien pour être populaire. Je ne cherchais pas la célébrité. J’ai fait du théâtre jusqu’à 35, 40 ans. Je criais famine car le théâtre contemporain ne nourrit pas son homme. Au début de ma carrière, avec ma petite compagnie, nous avons produit une quinzaine de pièces ; trois ou quatre ont eu un certain succès. J’avais des enfants et il fallait faire bouillir la marmite… Je prenais ce qui venait… en refusant toutefois deux choses : la publicité et les sitcoms. C’est seulement à 39 ans que j’ai fait le casting pour Navarro. Et c’est là que tout a commencé pour moi en termes de « célébrité ».

Vous êtes dans un registre plutôt « populaire ». Hasard, choix ou renvoi d’ascenseur faisant écho à vos origines sociales modestes qui vous conduisent, par ailleurs, à être un très actif parrain du Secours populaire français ?

Les séries dont j’ai écrit le scénario posent des questions sociales : Les Monos, par exemple, et même Père et Maire me tiennent à cœur précisément parce qu’elles allient le divertissement et l’éducatif… Aujourd’hui, ce mélange entre questions sociales et distraction est terminé. C’est dommage. Bien qu’issu d’une famille très modeste, je n’ai jamais manqué de rien. Il m’en reste la connaissance vécue de ce monde des « modestes ». Et encore, à l’époque, tout le monde avait un travail ! Je suis et je reste au Secours populaire parce que je suis sûr que là, tout l’argent récolté va à ceux qui en ont besoin. Je suis impressionné par ses 80 000 bénévoles. Je constate que ce ne sont pas les riches qui donnent. Les riches font la charité, pas de la solidarité !

La solidarité doit donc, selon vous, interpeller les raisons et les responsables qui l’ont rendue nécessaire ?

Evidemment ! À chaque fois qu’on me sollicite, comme l’a fait en son temps L’Huma, je dénonce sur le fond les injustices que produit le système social en place qui confisque la richesse au seul profit d’une minorité et musèle la parole par l’argent. Je ne le fais pas en terme « militant » (si l’on attache à ce mot l’idée de « prêt à penser » ou « dogmatisme »), mais parce que je suis tout simplement un citoyen. J’ai en ce sens deux autres engagements associatifs auxquels je tiens et je me tiens : ADMD (Association pour le Droit à mourir dans la dignité) et Amnesty International.

Que vous inspire l’irruption des gilets jaunes dans le mouvement social ?

Les gilets jaunes, c’est pour moi plus compliqué. Au départ, je suis avec eux pour dire « y en a marre ! ». Mais c’est devenu un mouvement protéiforme. Certains, parmi eux, ont privé tous les autres de leur combat légitime en tentant de faire passer ou promouvoir le pire de la pensée. J’ai compilé un certain nombre d’images de pancartes sur les ronds-points ou dans les manifs. C’est atterrant ! On ne peut pas tolérer ça ! Je comprends que ce soit très compliqué pour le syndicalisme qui doit, lui, se remettre en cause -pas sur le fond qui colle avec ce qu’avancent comme authentiques questions revendicatives les gilets jaunes- mais sur les moyens et formes traditionnels de son combat dans un monde du travail qui a changé.

Mai 68, c’était un autre monde. Quel syndicat a aujourd’hui la force d’être cet interlocuteur de poids ? D’autant que Macron les a volontairement déséquilibrés, ignorés. Je suis inquiet, oui. La situation me rappelle la métaphore qu’employait le père de Daniel Rialet (mon compère dans Les Monos et Père et Maire avec lequel j’ai tourné 112 films) : « Il ne faut jamais laisser une étagère vide…Il y a toujours quelqu’un pour mettre n’importe quoi dessus ! »

Propos recueillis par Pierre Corneloup
Entretien réalisé le 28 janvier 2019.

 

Christian Rauth est scénariste des séries télévisées Les Monos et Père et Maire, également du film Omnibus, primé à Cannes.
Sous sa casquette de romancier, il a écrit Le Brie ne fait pas le moine (Ed. Baleine), Crime pour l’humanité (Ed. hors commerce), Fin de série (Ed. M. Lafon) et, à paraître, La petite mort de Virgile (Ed. De Borée).

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