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"L'écologie peut encore sauver l'économie" de Gérard Le Puill

Journaliste, spécialiste des questions agricoles et environnementales, Gérard Le Puill dénonce les dérives d’un marché libéral et mondialisé. Dans son nouvel ouvrage, Comment l’écologie peut sauver l’économie ? Il suggère aussi des solutions pour relever le défi de l’urgence climatique.

 

Ton livre sort au moment où la France s’apprête à accueillir une conférence sur le climat aux enjeux majeurs pour la planète. Qu’est-ce qui t’a poussé à intervenir dans ce débat ?

 Gérard Le Puill : Avec cette double activité de journaliste et d’essayiste qui s’intéresse à l’environnement et à l’agriculture, j’ai voulu prolonger la réflexion engagée dans mes autres livres sur les questions agricoles. Depuis 1989, je pointe les absurdités et les dangers de notre système de production agroalimentaire. Compte tenu des problèmes que pose désormais le réchauffement climatique sur l’agriculture, j’ai voulu élargir le sujet à l’ensemble des activités économiques pour démontrer l’urgence à modifier la conduite générale de l’économie. Ainsi la réduction notable des émissions de gaz à effets de serre contiendrait le réchauffement climatique dans le cadre des 2°C au-delà desquels on court à la catastrophe.

Si on regarde aujourd’hui ce qui s’écrit sur l’environnement, 95% des journalistes et des économistes, qu’ils soient libéraux ou keynésiens, ne prennent pas en compte l’impact de l’économie sur les dérèglements climatiques…

 

Du côté des responsables politiques au pouvoir, c’est la même approche ?

 Gérard Le Puill : Malheureusement, je le crois. On se souvient de la fameuse phrase de Jacques Chirac, en 2002, lors de l’Assemblée plénière au Sommet de la terre à Johannesburg : « notre maison brûle et nous regardons ailleurs ». Phrase qui lui avait été soufflée par Nicolas Hulot. Certes, après, Nicolas Sarkozy a mis en place le Grenelle de l’environnement, mais a aussi demandé à Jacques Attali un rapport sur la libéralisation de l’économie. François Hollande n’est pas en reste. Avec sa loi Macron dont le libéralisme est le fil conducteur, y compris en matière d’environnement, il reprend ce que ce Sarkozy n’avait pas voulu prendre du rapport Attali... Rapport fortement inspiré, d’ailleurs, par un certain Emmanuel Macron…


Dans ton livre, tu démontres que c’est la course au profit qui met le feu à la planète. De quelle manière ?

 Gérard Le Puill : L’économie libérale cherche la rentabilité immédiate. On est dans une politique de l’offre de produits qui, sur fond de concurrence, les modifie sans cesse et gaspille beaucoup de capital. On fait produire à bas coûts d’un côté de la planète et on importe de l’autre. Un gaspillage très largement émetteur de gaz à effet de serre. Comme ce capital a été détruit avant qu’il n’ait été rentable, on agit en amont et partout en comprimant les salaires, avec les conséquences que l’on sait sur les retraites. C’est le marché qui pilote l’économie.

Dans un pays comme la France, du temps du Général De Gaulle, il y avait une volonté de planification. Soit, d’inspiration capitaliste, mais depuis une quarantaine d’année, il n’y a plus de planification du tout. Il faut vite sortir de cette spirale mortifère pouvant conduire, à court terme, à l’effondrement de nos sociétés. Sans une régulation de l’offre compatible avec ce que peut absorber la planète, l’économie connaîtra encore des crises cycliques de plus en plus graves.


Donc, pas de transition écologique sans transition économique ? Comment répondre à l’urgence ?

Oui, une véritable transition écologique est incompatible avec l’économie libérale dont je souligne les dérives. Sans doute faut-il revenir à des formes d’anticipation pour privilégier l’intérêt général de la planète et non les intérêts de quelques-uns ? Tout en insistant sur la nécessité de changer la donne économique, je crois que nous pouvons aussi modifier nos comportements quotidiens en étant davantage encore éco-citoyens. Autant que possible, il faut privilégier les circuits courts, les consommations saisonnières…


Sur l’urgence, je pense qu’il est possible de consommer globalement moins d’énergie, de changer les pratiques agricoles sans mettre en cause l’alimentation de tous sur la planète, de mettre en place de véritables filières de recyclage des matières, proposer un bouquet d’énergies renouvelables… Pour avoir un impact significatif, ces mesures diversifiées et convergentes doivent être engagées en même temps.

Après Kyoto en 1997, Johannesburg en 2002, Lima en 2014, la conférence de Paris en décembre prochain est-elle un simple sommet de plus ?

 Gérard Le Puill : Je crois que le sommet de Paris n’est pas un simple rendez-vous de plus. Il montre que, malgré tout, il existe une prise de conscience de la plupart des États. Mais, je ne suis pas très optimiste. Mon livre tire la conclusion que l’on recule plus que l’on avance dans la lutte contre le réchauffement climatique. Je redoute que l’on ne prenne pas les bonnes mesures sur le terrain économique. Reste que la donne peut changer si les peuples interviennent davantage dans le débat. Déjà, ils évoluent dans leur vie quotidienne. Le mouvement associatif est très présent sur la question de circuits courts, sur les modes de production et de consommation. En tout cas, c’est une des clés pour éviter que le système ne s’effondre.

 

 Gérard Le Puill


 Il est devenu journaliste à 42 ans, suite à son licenciement pour cause de fermeture d’usine. Aujourd’hui retraité, il collabore à l’Humanité, à La Terre et à Vie Nouvelle. Essayiste, spécialiste des mondes agricoles et des questions environnementales, notre confrère travaille avec talent à l’éveil des consciences. Convaincu qu’il est possible de produire en harmonie avec notre biotope, il est l’auteur de nombreux ouvrages de référence sur ces sujets aux enjeux fondamentaux pour l’avenir même de la planète et de l’humanité : - Produire mieux pour manger tous, d’ici 2050 et bien après, éditions Pascal Galodé, 2013
- Bientôt nous aurons faim, éditions Pascal Galodé, 2011
- Planète alimentaire, l’agriculture française face au chaos mondial, éditions Pascal Galodé, 2008
- Les vendanges de la colère - Midi viticole, avec Christophe Deroubaix et Alain Raynal, éditions Au Diable Vauvert, 2007
- La décennie des nouveaux pauvres, avec Stéphane Le Puill, éditions Messidor 1990
- L’enjeu agricole et alimentaire, avec André Lajoinie et Fabien Raynaud, éditions Messidor, 1989

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