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Philippe Torreton : « Emparons-nous du débat, repoussons cette omniprésence de l'économie.»

Le sourcil de ce « citoyen-comédien » (l’inverse lui va aussi) partage son regard entre l’humanisme de son livre Mémé(1) et les lucides colères de ses Lettres ouvertes à toi Président(2). Une rencontre intense.

Quelle est cette nostalgie que beaucoup d’autres hommes et femmes de votre génération ont, de « n’être pas venu au monde plus tôt et (avoir) mené quelques combats ouvriers. » ?

Tout s’est dilué, la classe ouvrière a diminué, les oppositions semblent - d’apparence - moins frontales et, du coup je pense que tout ce monde désolidarisé est un peu paumé. Tout lui est présenté comme affaire d’experts : « Si tu ne t’y connais pas, tu la fermes ! ». Oui j’aurais aimé être de ce monde où il y avait une plus grande force et unité. Les luttes sporadiques d’aujourd’hui n’ont pas changé de fond. Ce serait, parait-il, en laissant les riches s’enrichir un peu plus que les pauvres le seraient moins ! À cette question fondamentale n’il y a-t-il pas d’autre réponse que l’« optimisation fiscale » promotionnée par les banques et tolérée par les gouvernements qui participent, entre autre, à ce que 10% des fortunés de cette planète confisquent 83 % du patrimoine mondial ? Et à quoi servent les 110 milliards d’aide de l’État aux entreprises et les 590 milliards d’impôts qui échappent au Trésor public par le jeu de l’évasion fiscale !?»

Notre approche syndicale partage ces analyses économiques fondamentales qui fondent votre action. Mais alors qu’écrivez-vous ? Votre colère, une condamnation ? Et à qui adressez-vous ces lettres ? À François Hollande, comme un rappel aux promesses trahies ? Au peuple de France pour qu’il se bouge ?


Aux deux ! Mémé, à sa façon est aussi un livre politique sur des valeurs aujourd’hui menacées. Je n’ai d’ailleurs pas adressé ces lettres à François Hollande avant de les publier. À chacun de faire ce qui lui revient ! Si j’avais un message ce serait de dire : « emparons-nous du débat, de ce combat politique, parlons, échangeons, ferraillons, repoussons cette omniprésence de l’économie. » « Le courage, c’est d’aller à l’idéal et de comprendre le réel », disait Jaurès. Des voix commencent de s’élever pour dire que cette distorsion entre fortune et pauvreté ne pourra pas durer.

« Je revendique une cohérence
dans mes prises de positions politiques. »

Comment recevoir sans réagir les propos d’un Emanuel Macron disant : « Il faut des jeunes français qui aient envie de devenir milliardaires » ! Moi, j’aimerais qu’on leur donne la possibilité d’être inventifs, entreprenants, avec pour ambition de partager le génie de leurs découvertes et leur autre philosophie des rapports sociaux. Je ne crois pas que les gens aient, à ce point, envie et comme motivation de devenir « riches ». Par contre, ils ont envie d’être « utiles ». Or, sous les coups des déréglementations en cours, ce noble Travail qui les rend utiles est devenu une « tâche » qui les rejette.

Au fil de vos lettres, nous relevons votre condamnation de ceux, y compris de vos amis qui ont voté « Non » à la constitution européenne en 2005. Ils rejoignaient pourtant l’opinion majoritaire du peuple français. Bien de nos malheurs et injustices d’aujourd’hui, que vous condamnez, découlent pourtant de là !


Au départ, j’étais contre ce referendum peu adapté à une chose d’une complexité terrible. Néanmoins, il y avait un espace pour la réforme et l’« exception culturelle française » semblait y être prise en considération. Ce que je fustige dans mon livre, c’est le manque de loyauté de socialistes au positionnement adopté majoritairement par leur Parti. Je ne suis adhérent nulle part. Je revendique par contre une cohérence dans mes prises de positions politiques. Je concède que l’Europe (qui a par contre raison de nous taper sur les doigts sur des situations inadmissibles comme la situation dans les prisons) nous ressert aujourd’hui - au travers de ses exigences libérales - ce que nous avions pourtant repoussé hier. Aujourd’hui je serais plutôt pour le Non.

En conclusion, si nous évoquions la pièce de Brecht, La résistible ascension d’Arturo Ui(3) au sujet de la montée des idées de rejet et d’exclusion qui, sur fond de « crise » nourrissent l’influence grandissante du FN.


Je vais remonter cette pièce que nous produirons dans la période qui correspondra aux prochaines élections présidentielles. Ce sera une autre forme de contribution au débat. Le risque est en effet là. Il ne faut pas seulement le combattre, il faut combattre cela en faisant campagne pour nos idées. Mon ami et footballeur, Éric Cantona dit : « Je joue contre l’idée de perdre »… C’est mon état d’esprit. C’est le sujet et l’objet de mes livres !

Propos recueillis par Pierre Corneloup

(1) Éditions l’iconoclaste
(2) Éditions Flammarion
(3) La résistible ascension d’Arturo Ui, pièce écrite en 1941 par Berthold Brecht, est une parabole sur la prise du pouvoir par Hitler, transposée dans le milieu du crime et de la mafia, à l’époque, aux États-Unis.





 

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