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Palestine. Des droits et de la solidarité

Mieux connaître la souffrance et la résistance du peuple palestinien victime de la colonisation et de l'apartheid, c'est aussi lui exprimer notre soutien dans la lutte qu'il mène pour la liberté et le respect des droits humains. Reportage en Cisjordanie.

 

« Ici, aux pentes des collines, face au crépuscule et au canon du temps
Près des jardins aux ombres brisées,
Nous faisons ce que font les prisonniers,
Ce que font les chômeurs :
Nous cultivons l’espoir. »

Ces mots (« État de siège », janvier 2002) du poète palestinien Mahmoud Darwich (ci-contre) imprègnent au plus profond la conscience d'un peuple et l'encouragent à résister.
Cultiver l'espoir ? Quand les accords d'Oslo signés en 1993 sont vécus comme une duperie. Ils devaient cinq ans plus tard officialiser la naissance d'un État palestinien viable sur les frontières de 1967, avec Jérusalem-Est comme capitale ?


Quand, 67 ans après avoir été chassés de leurs villages et de leur terre, des centaines de milliers de Palestiniens restent toujours parqués dans des camps de réfugiés et se voient refuser le droit au retour.
Quand il est interdit de bâtir sa maison, de cultiver sa terre, d'utiliser l'eau de son propre sous-sol.
Quand le laxisme ou la lâcheté des gouvernements européens et américains confortent les gouvernants d'Israël dans leur politique criminelle d'occupation et de colonisation.
Plusieurs rencontres, des paroles recueillies lors d'un récent séjour en Cisjordanie permettent de décrire l'insupportable vécu quotidien de salariés et de paysans palestiniens.

Tulkarem : foirail de nuit pour gens de labeur

C'est la nuit à Tulkarem, cité palestinienne située au nord-ouest de la Cisjordanie et coincée entre le mur de séparation ou mur de l'apartheid et la pollution d'usines chimiques israéliennes. Des flots de taxis déboulent sur une sorte de foirail de nuit pour gens de labeur et déversent des grappes d'hommes repliés sur eux-mêmes, la mine fatiguée.


Casquette vissée sur le crâne, musette en bandoulière et cigarette aux lèvres, ils sont les journaliers palestiniens qui travaillent en Israël.
De 3 000 jusqu'à 12 000 suivant les jours, qui franchissent le check-point de Tulkarem pour aller trimer dans des fermes ou sur des chantiers. Comme chaque nuit, ils se préparent à subir une épreuve tout aussi pénible qu'humiliante face à l'arbitraire des militaires israéliens qui surveillent, contrôlent, autorisent ou interdisent l'accès au gagne-pain.


Les groupes se forment dès trois heures du matin avec l'espoir de sauter dans les bus qui, de l'autre côté du mur, démarrent à cinq heures pétantes pour une à deux heures de trajet.
Dans l'attente de l'ouverture des portails, tourniquets et barrières, ils se fournissent en café chaud ou brochettes dans des stands sous bâches et autres commerces de fortune. Certains se recroquevillent autour de braseros. Puis, ils prennent place, patientent et s'empilent, l'un derrière l'autre, dans des espaces éclairés et bordés de grilles devant des tourniquets, ou « plumoirs », qui ne tourniquent que par fournée de dix.



Les portails ne s'ouvrent qu'à partir de 4 h du matin. Sur seize portes, quatre seulement sont habituellement ouvertes. Trois pour les hommes, une réservée aux femmes. Au bout, c'est la vérification des papiers, de l'autorisation de travail, l'inspection bras levés, jambes écartées, le scanner intégral du corps, puis l'appel nom par nom. Cela peut durer de cinq à trente minutes. Il suffit de quelques contrôles supplémentaires, de la provocation d'un militaire, d'un Palestinien qui craque pour que la file s'étire, pour que les groupes s'entassent jusqu'au blocage. En novembre 2014, un jeune Palestinien est mort asphyxié. Des grèves ont arraché quelques améliorations.


« Ces pratiques d'humiliation quotidienne plongent encore plus les Palestiniens dans la précarité », dénonce Mohammad Blady, syndicaliste à la Fédération des nouveaux syndicats. Il affirme qu'environ 30 % des journaliers restent dormir en clandestins sur leur lieu de travail et prennent de gros risques. Ils bravent l'interdit pour ne pas avoir à subir chaque matin l'insoutenable épreuve.

Sentinelles en résistance sur la Vallée du Jourdain

Un long chemin de terre cabossé et poussiéreux mène vers quatre grandes tentes couvertes de bâches usées. Et deux remorques-citernes d'eau. À gauche, un arpent de blé pour nourrir les bêtes voisine avec quelques plants d'oliviers récemment plantés. Des femmes et des jeunes s'affairent aux activités rurales et domestiques, assurant qu'ici la vie triomphe encore de l'occupant.
Ici, dans la Vallée du Jourdain, au nord de Jéricho sur le territoire de la commune de Al Jiftlik, vivent, travaillent et résistent Abou Saqr, éleveur bédouin, et sa famille.
Planté sur un dérisoire piquet au centre de l'espace vital, un fanion palestinien veille. Dressé en sentinelle, il rappelle aux colons israéliens implantés et surprotégés quelques centaines de mètres en contre-bas, dans des maisons en dur accolées aux rangées de serres irriguées à foison, qu'ils occupent illégalement ce sol.


L'armée israélienne s'est arrogé tous les droits sur la Vallée du Jourdain décrétée zone militaire fermée. Sur les 2 400 km2 qui forment la vallée, l'Autorité palestinienne en administre seulement quarante-cinq.

« Nous sommes devenus illégaux chez nous, les colons russes qui arrivent obtiennent toutes les autorisations alors que le gouvernement israélien nous interdit de construire des maisons, des écoles, et d'accéder à l'eau de notre sous-sol », tempête Abou Saqr. Chargé par ses compatriotes de coordonner le comité populaire de résistance, il dénonce ce qu'il qualifie de deuxième « Nakba » ou catastrophe. Celle menée depuis 1967 par Israël qui a confisqué les terres et les élevages, puis détruit les maisons, plus de huit cents sur la commune de Al Jiftlik. Celle du pillage et du gaspillage de l'eau du Jourdain et du sous-sol. « Nous nous opposons résolument à la politique sioniste et barbare d'occupation et de colonisation, insiste Abou Saqr, et non aux juifs et au judaïsme que nous respectons, nous sommes tous d'une même histoire ».

Alain Raynal
Paru dans Présence, le magazine de LSR
Photo : Frédéric Scheiber

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Repères

Population : Sur les 12,1 millions de Palestiniens recensés dans le monde (fin 2014), 4,6 millions vivent dans les Territoires occupés. Dont 2,8 millions en Cisjordanie et 1,8 million dans la bande de Gaza. Au total, 5,49 millions (2015) sont enregistrés auprès de l’Onu pour l’aide aux réfugiés palestiniens.

Réfugiés : Trois millions de Palestiniens en exil vivent dans 31 camps de réfugiés en Syrie, au Liban et en Jordanie. Dans les Territoires occupés en Cisjordanie et à Gaza, plus de 700 000 réfugiés s'entassent dans 28 camps surpeuplés.

Colonisation : 500 000 colons israéliens vivent dans des colonies totalement illégales implantées en Cisjordanie et à Jérusalem Est.

Mur : Construit depuis 2002, le mur de séparation d'une hauteur de 8 m dépasse les 700 km de long. Il pénètre profondément à l'intérieur de la Cisjordanie pour englober les colonies israéliennes.

Prisonniers : Environ 7200 prisonniers (septembre 2014) sont détenus dans les prisons israéliennes dont des femmes, des enfants, des personnes âgées et des malades, en toute illégalité au regard du droit international.

(Sources : organisations humanitaires et Droits de l'homme)

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